From TV5
MÉLUSINE, LA FÉE SERPENT
Au cœur de la nuit, dans la forêt de Coulombiers, des bruits de sabots retentissent. C’est la monture du jeune Raymondin qui galope à vive allure. Le jeune homme vient de tuer par accident son oncle, le Comte de Poitiers, pendant une partie de chasse. Son chagrin se mêle à la peur. Il sait qu’il sera pendu aussitôt qu’on apprendra la nouvelle.
Soudain, des rires de femmes le tirent de ses sombres pensées. Près d’une fontaine, il aperçoit trois jeunes filles d’une beauté époustouflante. L’une d’entre elles, Mélusine, remarque sa présence et s’approche de lui :
– Quelle est donc la raison de tant de peine, beau chevalier ?
Mélusine écoute attentivement l’histoire de Raymondin. Elle comprend que ce jeune homme pourrait bien être celui qui la délivrera de sa terrible malédiction. Mélusine est condamnée à vivre éternellement en voyant, chaque samedi, ses jambes se transformer en une monstrueuse queue de serpent. Une punition infligée par sa mère alors que la jeune fille, pour la défendre, avait emprisonné son père dans les rochers d’une montagne. « S’il accepte de m’épouser et de ne jamais me surprendre le samedi dans mon triste état, le sort sera rompu et je pourrais vivre heureuse comme n’importe quelle mortelle », se dit-elle.
De sa voix la plus douce, elle réconforte Raymondin et lui promet de l’aider :
– Accepte de m’épouser. Je t’innocenterai et ferai de toi un homme riche et puissant. En échange, tu dois me promettre de ne jamais me voir le samedi, ni même chercher à savoir ce que je cache.
Subjugué par la beauté et la douceur de la jeune femme, Raymondin n’hésite pas une seconde. Le mariage est somptueux. Mélusine tient ses promesses. Grâce à ses pouvoirs de fée, elle édifie chaque nuit de grands monuments pour son mari, dont le château de Lusignan, près de la fontaine de leur rencontre.
Mélusine donne naissance à dix fils. Huit d’entre eux sont affublés d’une tare physique rappelant leur origine magique, mais leur destin grandiose est assuré. Bientôt, on ne parle plus que de la prospérité et du bonheur du couple. Mais, cela finit par attiser les plus viles jalousies. C’est le cas du Comte de Forez, frère de Raymondin.
Un beau jour, alors qu’il rend visite au couple, il voit Mélusine se retirer discrètement et s’enfermer dans une pièce à double tour. Il interroge Raymondin :
– Comment peux-tu être aussi aveugle ? Une épouse qui se cache est une épouse qui trahit. Ne vois-tu pas qu’elle rejoint un autre homme, tous les samedis ?
Peu à peu, le compte de Forez réussit à faire naître le doute dans l’esprit de son frère. « Et s’il avait raison ? Si toute cette richesse promise n’était que de la poudre aux yeux pour dissimuler sa trahison ? » Un samedi, c’est plus fort que lui. Il s’approche de la pièce où Mélusine s’enferme chaque semaine. Le cœur battant, il colle d’abord son oreille contre la porte, mais n’entend que la douce voix de sa femme qui chantonne. Il perce alors un petit trou dans le bois, à l’aide de sa dague. Après une grande inspiration, il ose y jeter un œil.
« Seigneur, quel horreur ! Ma femme est une serpente ! ». Au même instant, Mélusine aperçoit le trou dans la porte. Raymondin l’a trahie ! Les yeux plein de larmes, elle pousse un cri désespéré et s’envole par la fenêtre, éternellement transformée en femme-serpent.
Depuis ce jour, on raconte qu’elle survole la région et pousse un cri de lamentation chaque fois que ses biens changent de propriétaire ou qu’un membre de sa lignée est proche de la mort.
Textes : Aurélie Garnier, TV5.ca
Illustrations : Alexandra Myotte
http://focus.tv5monde.com/legendesfrancaises/
MERLIN ET LA FORÊT DE BROCÉLIANDE
Voilà bien longtemps que l’enchanteur Merlin s’évertue à unifier le Royaume de Bretagne aux côtés du bon roi Arthur. Voilà aussi bien longtemps qu’il ne s’est pas reposé en sa chère forêt de Brocéliande. C’est ici, en Bretagne, au milieu des grands arbres et des lacs qu’il se sent le mieux.
En cette belle matinée de printemps, Merlin, sous la forme d’un jeune homme plein de vie, se rend au cœur de Brocéliande. Non loin de la fontaine de Barenton, il aperçoit une jeune fille dont la beauté n’a d’égal que la grâce.
– Damoiselle, qui es-tu ? demande-t-il avec curiosité.
– Je suis Viviane, fille du seigneur de Comper.
Tous deux s’installent sur un rocher et conversent pendant des heures. Pour faire plaisir à la belle, Merlin fait apparaître une foule de musiciens, de danseurs et un château enchanté entouré de fleurs et d’arbres fruitiers. « Cette magie est sans aucun doute celle du grand Merlin », pense alors Viviane, émerveillée. La fête dure toute la nuit, puis le château disparaît.
– Mon doux ami, moi qui m’ennuie souvent, laissez-moi au moins le beau jardin que vous avez créé, le supplie-t-elle.
– Il m’est si difficile de vous résister. Soit, le « Jardin de joie » restera.
– J’aimerais tant connaître vos secrets. Me les apprendrez-vous ?
– Je pourrais, douce demoiselle, mais il faudrait alors me promettre votre amitié éternelle.
Viviane donne sa parole et Merlin s’engage à lui enseigner sa magie. Même fort amoureux, il sent que le royaume est en péril et n’oublie pas son devoir auprès du roi Arthur. Il quitte donc la belle à regret pour retourner à la cour.
À force de sages conseils et de quelques magies, Merlin aide Arthur à chasser les envahisseurs saxons et à réunifier le royaume. Avec hâte, il retourne au Jardin de joie où Viviane lui réserve un accueil si chaleureux qu’il s’en éprend encore plus.
Comme promis, il lui enseigne le pouvoir des plantes, la maîtrise des éléments, la métamorphose et le sort qui plonge quiconque dans un sommeil profond. L’esprit insatiable de Viviane en demande toujours plus tandis que l’amour grandissant de Merlin le fait céder à tous les caprices de la belle.
– Mon bel ami, j’aimerais tant posséder mon propre château, lumineux et plein de joie.
À ces mots, un château de cristal jaillit soudain au bord du lac.
– Douce Viviane, voici votre demeure. Nul autre que vous et votre cour ne pourrez la voir, vous serez ainsi en sécurité pendant mon absence.
– Me laissez-vous encore ? demande Viviane, désespérée.
– Je reviendrai vite.
– Promettez-moi qu’à votre retour, vous m’apprendrez le sort d’enserrement, lui demande-t-elle avec une infinie douceur.
– Qu’il en soit ainsi, répond Merlin dans un soupir.
De retour à la cour, Merlin prodigue ses derniers conseils au roi. Conscient des desseins de Viviane, il annonce à Arthur qu’il retourne définitivement en forêt de Brocéliande, où la belle l’attend, impatiente.
– Vous êtes enfin de retour, mon doux ami, s’écrie-t-elle avec joie. Vous rappelez-vous votre promesse ?
– Comment l’oublier ? répond Merlin.
L’enchanteur dévoile à sa belle le sortilège qui enserre un homme à jamais, puis s’endort profondément. Quelques heures plus tard, il se réveille dans un endroit merveilleux, mais entouré d’une paroi d’air infranchissable. À ses côtés, Viviane le regarde avec tendresse.
– Vous m’appartenez désormais comme je vous appartiens, Merlin. Nous vivrons heureux à tout jamais réunis, murmure-t-elle.
Ainsi, par amour, le grand Merlin renonce à sa liberté. Dans la forêt de Brocéliande se trouvent encore aujourd’hui quelques rochers que l’on appelle « le tombeau de Merlin ». Mais l’enchanteur n’y est pas enterré, il vit encore dans cette prison dorée que nul ne peut voir.
Textes : Aurélie Garnier, TV5.ca
Illustrations : Alexandra Myotte
http://focus.tv5monde.com/legendesfrancaises/
LA LÉGENDE DE LA PRINCESSE ÉNIMIE
Dans le royaume de Clotaire II, roi des Francs, tous les jeunes barons en âge de se marier parlent de la princesse Énimie et de son incroyable beauté. Chaque jour, le roi reçoit une demande pour la main de sa fille. Mais la princesse n’est pas seulement resplendissante, elle est aussi d’une grande vertu et ne cesse de repousser ses prétendants.
– Ma fille, tu as l’âge de prendre époux. Cesse de te comporter comme une enfant, lui dit un jour le roi avec lassitude.
– Père, je ne veux consacrer ma vie qu’à Dieu, et me dévouer aux plus démunis. Telle est Sa volonté, vous ne pouvez rien y faire.
– Puisque tu t’entêtes ainsi, je choisirai moi-même ton époux ! s’emporte le roi avant de quitter la pièce.
Énimie fond en larmes. Désespérée, elle invoque le seul qui puisse lui venir en aide.
– Seigneur, aie pitié de moi ! Prends ma beauté, que plus un homme ne s’intéresse à moi.
Épuisée par les sanglots, elle finit par s’endormir. Le lendemain, elle réalise avec stupeur que Dieu l’a exaucée. Son visage est recouvert de plaies immondes et douloureuses. Elle est complètement défigurée par la lèpre.
Les premiers temps, Énimie se réjouit de son sort. Plus personne ne veut l’épouser, elle peut maintenant consacrer sa vie aux pauvres et aux malades. Mais au bout de plusieurs années, devant l’impuissance des meilleurs médecins et le désespoir de ses parents et de son frère, le futur roi Dagobert, elle commence à regretter sa prière.
La douleur est de plus en plus vive, et le chagrin de son entourage ne fait que l’accentuer. Un soir, elle s’agenouille et prie :
– Seigneur, tu as exaucé ma prière la première fois, peut-être m’entendras-tu à nouveau. Je suis rongée par la douleur et le regret. Par pitié, fais disparaître ce mal.
À ces mots, un ange apparaît.
– Mon enfant, trouve la source de Burle dans la province du Gévaudan. Baigne-toi et ta prière sera exaucée.
Le lendemain, son père la fait aussitôt escorter jusqu’au Gévaudan. Après un long voyage, ils trouvent enfin la source. Énimie s’y plonge et, par miracle, toutes ses plaies disparaissent.
– Merci Seigneur ! s’exclame-t-elle avec joie.
Tout le cortège est en liesse. Dès le lendemain, ils reprennent la route pour regagner le château. Mais à peine se sont-ils éloignés qu’Énimie sent le mal la ronger de nouveau. Le cortège rebrousse chemin. Énimie se baigne dans la source et le miracle se reproduit. Ils repartent, mais plus ils s’éloignent, plus la maladie est virulente.
– Ainsi, la volonté de Dieu est que je reste en ces lieux païens pour Le servir, murmure-t-elle, pensive.
La princesse s’installe dans une grotte au creux de la montagne, laissant une grande partie de son escorte regagner le château. Pendant plusieurs années, elle accueille les pèlerins et accomplit des miracles en guérissant les malades au bord de la source. Elle fonde un monastère dont elle est nommée abbesse par l’évêque Ilère de Mende.
Mais le Drac, l’une des incarnations du Diable, voit d’un bien mauvais œil la présence de la sainte. Aussi sort-il régulièrement des gouffres de la montagne pour détruire le bâtiment. Épuisée par ces persécutions et déterminée à chasser le démon définitivement, Énimie demande l’aide de l’évêque Ilère. Ensemble, ils le combattent et le poursuivent à travers la montagne.
La course est effrénée jusqu’à une falaise surplombant le Tarn. Là, à bout de force, Ilère invoque la montagne. C’est alors que d’énormes rochers s’écrasent sur le Drac, l’obligeant à regagner les Enfers, fou de rage.
Aujourd’hui encore, on peut apercevoir le chaos des roches au Pas de Soucy. Un peu plus loin, on peut aussi s’émerveiller devant l’Ermitage, la grotte où, après le combat, sainte Énimie s’est retirée pour finir ses jours.
Textes : Aurélie Garnier, TV5.ca
Illustrations : Alexandra Myotte
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Au cœur de la nuit, dans la forêt de Coulombiers, des bruits de sabots retentissent. C’est la monture du jeune Raymondin qui galope à vive allure. Le jeune homme vient de tuer par accident son oncle, le Comte de Poitiers, pendant une partie de chasse. Son chagrin se mêle à la peur. Il sait qu’il sera pendu aussitôt qu’on apprendra la nouvelle.
Soudain, des rires de femmes le tirent de ses sombres pensées. Près d’une fontaine, il aperçoit trois jeunes filles d’une beauté époustouflante. L’une d’entre elles, Mélusine, remarque sa présence et s’approche de lui :
– Quelle est donc la raison de tant de peine, beau chevalier ?
Mélusine écoute attentivement l’histoire de Raymondin. Elle comprend que ce jeune homme pourrait bien être celui qui la délivrera de sa terrible malédiction. Mélusine est condamnée à vivre éternellement en voyant, chaque samedi, ses jambes se transformer en une monstrueuse queue de serpent. Une punition infligée par sa mère alors que la jeune fille, pour la défendre, avait emprisonné son père dans les rochers d’une montagne. « S’il accepte de m’épouser et de ne jamais me surprendre le samedi dans mon triste état, le sort sera rompu et je pourrais vivre heureuse comme n’importe quelle mortelle », se dit-elle.
De sa voix la plus douce, elle réconforte Raymondin et lui promet de l’aider :
– Accepte de m’épouser. Je t’innocenterai et ferai de toi un homme riche et puissant. En échange, tu dois me promettre de ne jamais me voir le samedi, ni même chercher à savoir ce que je cache.
Subjugué par la beauté et la douceur de la jeune femme, Raymondin n’hésite pas une seconde. Le mariage est somptueux. Mélusine tient ses promesses. Grâce à ses pouvoirs de fée, elle édifie chaque nuit de grands monuments pour son mari, dont le château de Lusignan, près de la fontaine de leur rencontre.
Mélusine donne naissance à dix fils. Huit d’entre eux sont affublés d’une tare physique rappelant leur origine magique, mais leur destin grandiose est assuré. Bientôt, on ne parle plus que de la prospérité et du bonheur du couple. Mais, cela finit par attiser les plus viles jalousies. C’est le cas du Comte de Forez, frère de Raymondin.
Un beau jour, alors qu’il rend visite au couple, il voit Mélusine se retirer discrètement et s’enfermer dans une pièce à double tour. Il interroge Raymondin :
– Comment peux-tu être aussi aveugle ? Une épouse qui se cache est une épouse qui trahit. Ne vois-tu pas qu’elle rejoint un autre homme, tous les samedis ?
Peu à peu, le compte de Forez réussit à faire naître le doute dans l’esprit de son frère. « Et s’il avait raison ? Si toute cette richesse promise n’était que de la poudre aux yeux pour dissimuler sa trahison ? » Un samedi, c’est plus fort que lui. Il s’approche de la pièce où Mélusine s’enferme chaque semaine. Le cœur battant, il colle d’abord son oreille contre la porte, mais n’entend que la douce voix de sa femme qui chantonne. Il perce alors un petit trou dans le bois, à l’aide de sa dague. Après une grande inspiration, il ose y jeter un œil.
« Seigneur, quel horreur ! Ma femme est une serpente ! ». Au même instant, Mélusine aperçoit le trou dans la porte. Raymondin l’a trahie ! Les yeux plein de larmes, elle pousse un cri désespéré et s’envole par la fenêtre, éternellement transformée en femme-serpent.
Depuis ce jour, on raconte qu’elle survole la région et pousse un cri de lamentation chaque fois que ses biens changent de propriétaire ou qu’un membre de sa lignée est proche de la mort.
Textes : Aurélie Garnier, TV5.ca
Illustrations : Alexandra Myotte
http://focus.tv5monde.com/legendesfrancaises/
MERLIN ET LA FORÊT DE BROCÉLIANDE
Voilà bien longtemps que l’enchanteur Merlin s’évertue à unifier le Royaume de Bretagne aux côtés du bon roi Arthur. Voilà aussi bien longtemps qu’il ne s’est pas reposé en sa chère forêt de Brocéliande. C’est ici, en Bretagne, au milieu des grands arbres et des lacs qu’il se sent le mieux.
En cette belle matinée de printemps, Merlin, sous la forme d’un jeune homme plein de vie, se rend au cœur de Brocéliande. Non loin de la fontaine de Barenton, il aperçoit une jeune fille dont la beauté n’a d’égal que la grâce.
– Damoiselle, qui es-tu ? demande-t-il avec curiosité.
– Je suis Viviane, fille du seigneur de Comper.
Tous deux s’installent sur un rocher et conversent pendant des heures. Pour faire plaisir à la belle, Merlin fait apparaître une foule de musiciens, de danseurs et un château enchanté entouré de fleurs et d’arbres fruitiers. « Cette magie est sans aucun doute celle du grand Merlin », pense alors Viviane, émerveillée. La fête dure toute la nuit, puis le château disparaît.
– Mon doux ami, moi qui m’ennuie souvent, laissez-moi au moins le beau jardin que vous avez créé, le supplie-t-elle.
– Il m’est si difficile de vous résister. Soit, le « Jardin de joie » restera.
– J’aimerais tant connaître vos secrets. Me les apprendrez-vous ?
– Je pourrais, douce demoiselle, mais il faudrait alors me promettre votre amitié éternelle.
Viviane donne sa parole et Merlin s’engage à lui enseigner sa magie. Même fort amoureux, il sent que le royaume est en péril et n’oublie pas son devoir auprès du roi Arthur. Il quitte donc la belle à regret pour retourner à la cour.
À force de sages conseils et de quelques magies, Merlin aide Arthur à chasser les envahisseurs saxons et à réunifier le royaume. Avec hâte, il retourne au Jardin de joie où Viviane lui réserve un accueil si chaleureux qu’il s’en éprend encore plus.
Comme promis, il lui enseigne le pouvoir des plantes, la maîtrise des éléments, la métamorphose et le sort qui plonge quiconque dans un sommeil profond. L’esprit insatiable de Viviane en demande toujours plus tandis que l’amour grandissant de Merlin le fait céder à tous les caprices de la belle.
– Mon bel ami, j’aimerais tant posséder mon propre château, lumineux et plein de joie.
À ces mots, un château de cristal jaillit soudain au bord du lac.
– Douce Viviane, voici votre demeure. Nul autre que vous et votre cour ne pourrez la voir, vous serez ainsi en sécurité pendant mon absence.
– Me laissez-vous encore ? demande Viviane, désespérée.
– Je reviendrai vite.
– Promettez-moi qu’à votre retour, vous m’apprendrez le sort d’enserrement, lui demande-t-elle avec une infinie douceur.
– Qu’il en soit ainsi, répond Merlin dans un soupir.
De retour à la cour, Merlin prodigue ses derniers conseils au roi. Conscient des desseins de Viviane, il annonce à Arthur qu’il retourne définitivement en forêt de Brocéliande, où la belle l’attend, impatiente.
– Vous êtes enfin de retour, mon doux ami, s’écrie-t-elle avec joie. Vous rappelez-vous votre promesse ?
– Comment l’oublier ? répond Merlin.
L’enchanteur dévoile à sa belle le sortilège qui enserre un homme à jamais, puis s’endort profondément. Quelques heures plus tard, il se réveille dans un endroit merveilleux, mais entouré d’une paroi d’air infranchissable. À ses côtés, Viviane le regarde avec tendresse.
– Vous m’appartenez désormais comme je vous appartiens, Merlin. Nous vivrons heureux à tout jamais réunis, murmure-t-elle.
Ainsi, par amour, le grand Merlin renonce à sa liberté. Dans la forêt de Brocéliande se trouvent encore aujourd’hui quelques rochers que l’on appelle « le tombeau de Merlin ». Mais l’enchanteur n’y est pas enterré, il vit encore dans cette prison dorée que nul ne peut voir.
Textes : Aurélie Garnier, TV5.ca
Illustrations : Alexandra Myotte
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LA LÉGENDE DE LA PRINCESSE ÉNIMIE
Dans le royaume de Clotaire II, roi des Francs, tous les jeunes barons en âge de se marier parlent de la princesse Énimie et de son incroyable beauté. Chaque jour, le roi reçoit une demande pour la main de sa fille. Mais la princesse n’est pas seulement resplendissante, elle est aussi d’une grande vertu et ne cesse de repousser ses prétendants.
– Ma fille, tu as l’âge de prendre époux. Cesse de te comporter comme une enfant, lui dit un jour le roi avec lassitude.
– Père, je ne veux consacrer ma vie qu’à Dieu, et me dévouer aux plus démunis. Telle est Sa volonté, vous ne pouvez rien y faire.
– Puisque tu t’entêtes ainsi, je choisirai moi-même ton époux ! s’emporte le roi avant de quitter la pièce.
Énimie fond en larmes. Désespérée, elle invoque le seul qui puisse lui venir en aide.
– Seigneur, aie pitié de moi ! Prends ma beauté, que plus un homme ne s’intéresse à moi.
Épuisée par les sanglots, elle finit par s’endormir. Le lendemain, elle réalise avec stupeur que Dieu l’a exaucée. Son visage est recouvert de plaies immondes et douloureuses. Elle est complètement défigurée par la lèpre.
Les premiers temps, Énimie se réjouit de son sort. Plus personne ne veut l’épouser, elle peut maintenant consacrer sa vie aux pauvres et aux malades. Mais au bout de plusieurs années, devant l’impuissance des meilleurs médecins et le désespoir de ses parents et de son frère, le futur roi Dagobert, elle commence à regretter sa prière.
La douleur est de plus en plus vive, et le chagrin de son entourage ne fait que l’accentuer. Un soir, elle s’agenouille et prie :
– Seigneur, tu as exaucé ma prière la première fois, peut-être m’entendras-tu à nouveau. Je suis rongée par la douleur et le regret. Par pitié, fais disparaître ce mal.
À ces mots, un ange apparaît.
– Mon enfant, trouve la source de Burle dans la province du Gévaudan. Baigne-toi et ta prière sera exaucée.
Le lendemain, son père la fait aussitôt escorter jusqu’au Gévaudan. Après un long voyage, ils trouvent enfin la source. Énimie s’y plonge et, par miracle, toutes ses plaies disparaissent.
– Merci Seigneur ! s’exclame-t-elle avec joie.
Tout le cortège est en liesse. Dès le lendemain, ils reprennent la route pour regagner le château. Mais à peine se sont-ils éloignés qu’Énimie sent le mal la ronger de nouveau. Le cortège rebrousse chemin. Énimie se baigne dans la source et le miracle se reproduit. Ils repartent, mais plus ils s’éloignent, plus la maladie est virulente.
– Ainsi, la volonté de Dieu est que je reste en ces lieux païens pour Le servir, murmure-t-elle, pensive.
La princesse s’installe dans une grotte au creux de la montagne, laissant une grande partie de son escorte regagner le château. Pendant plusieurs années, elle accueille les pèlerins et accomplit des miracles en guérissant les malades au bord de la source. Elle fonde un monastère dont elle est nommée abbesse par l’évêque Ilère de Mende.
Mais le Drac, l’une des incarnations du Diable, voit d’un bien mauvais œil la présence de la sainte. Aussi sort-il régulièrement des gouffres de la montagne pour détruire le bâtiment. Épuisée par ces persécutions et déterminée à chasser le démon définitivement, Énimie demande l’aide de l’évêque Ilère. Ensemble, ils le combattent et le poursuivent à travers la montagne.
La course est effrénée jusqu’à une falaise surplombant le Tarn. Là, à bout de force, Ilère invoque la montagne. C’est alors que d’énormes rochers s’écrasent sur le Drac, l’obligeant à regagner les Enfers, fou de rage.
Aujourd’hui encore, on peut apercevoir le chaos des roches au Pas de Soucy. Un peu plus loin, on peut aussi s’émerveiller devant l’Ermitage, la grotte où, après le combat, sainte Énimie s’est retirée pour finir ses jours.
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